vendredi 28 novembre 2014

PANORAMA JEUNESSE - 3/7 - MICHEL DEFOURNY

MICHEL FEFOURNY

est un chercheur belge qui travaille sur la littérature jeunesse. Conseiller pour certains éditeurs, conférencier un peu partout sur différents sujets, il écrit aussi de nombreux articles toujours sur les livres jeunesse. Son impressionnante collection de livres a servit de base au centre de littérature Jeunesse de la Ville de Liège qu’il a crée en 2010.

Je l'avais invité l'année dernière à proposer une sélection. J'avais apprécié sa manière simple et inspirée d'écrire sur les livres. C'est avec plaisir que je reconduis cette invitation.

SA SÉLECTION :

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CACHE-CACHE FANTÔMES de Pam Adams & Ceri Jones
Angleterre – 1974 - 2014 - Didier Jeunesse -

Voilà longtemps que je souhaitais voir cet album des années soixante-dix publié en langue française. Je me réjouis donc de sa parution chez Didier Jeunesse. Une obsession traverse le livre d’un bout à l’autre : les fantômes sont partout ! Mais tournez la page, une surprise vous attend. A l’inquiétude provoquée par les silhouettes qui flottent dans l’espace fait suite un éclat de rire provoqué par la méprise. L’efficacité de l’album tient à la simplicité des moyens, quelques découpes habiles, des formes stylisées et des pages de couleurs. Une réserve cependant, je regrette que l’éditeur ait renoncé au titre anglais, beaucoup plus mystérieux, A book of ghosts.

La collection Cligne cligne

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ROND ET ROND ET CARRE de Fredun Shapur,
USA – 1965 - 2014 - MeMo - 14 €

Fredun Shapur que l’on vient de (re)découvrir grâce à la monographie que lui a consacrée Amy F. Ogata et Mira Shapur aux éditions Piqpoq est un designer britannique passionné par le jouet et le graphisme. Rond et rond et carré propose une narration ludique  et poétique construite à partir de combinaisons des formes géométriques élémentaires que sont le cercle et le carré. Les formes abstraites se découpent, se multiplient, s’assemblent ... Et, sous nos yeux ébahis, elles deviennent figuratives. Elles deviennent « plein de choses », dit le texte. Maisons, buildings, églises, wagons qui grimpent tout en haut d’un pic pour redescendre aussitôt. Plus étonnant encore, cercles et carrés deviennent des enfants, petits garçons et petites filles dont les jouets sont cheval à bascule, cerf volant ou tracteur… L’album publié en 1965 chez Abelard-Schuman à New York n’avait jamais été publié en France. Dans l’histoire de l’album, celui-ci s’inscrit dans une tradition initiée par Ronds et Carrés de Nathalie Parain, paru chez le Père Castor en 1932, à une époque où les avant-gardes artistiques exploraient l’abstraction géométrique avec des mouvements comme de Stijl ou le Bauhaus, avec des créateurs comme Wassily Kandinsky, Fernand Léger, Théo Van Doesburg, Auguste Herbin et bien d’autres. Depuis lors différents créateurs d’albums ont pris le relais. Citons Serge Wischnevsky, Leo Lionni, Anne Bertier, et Julien Magnani dont le dernier titre Maison, paru en 2014 aux éditions Magnani, mérite le détour.

editions-memo.fr

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SAUTE de Tatsuhide Matsuoka
Japon – 2000 - 2014 - L’Ecole des loisirs - 6 €

Un solide tout carton, de format carré, à ouvrir vers le haut. En couverture, une grenouille fixe le lecteur. Telle une athlète concentrée juste avant l’exploit, la voilà prête à bondir, tandis qu’en lettres rouges, le titre saute aux yeux. L’album montre une succession d’animaux, un chaton, un chien, une sauterelle… dans cette même position d’attente, suivie immédiatement par le saut qu’accompagne l’injonction : « saute ». Tatsuhide Matsuoka exploite remarquablement l’espace de la page. Après la phase de concentration, l’animal bondit. Tout en se déployant largement, il frôle le bord supérieur de la double page. La puissance du mouvement est renforcée par des variations typographiques qu’accompagnent, comme dans une bd, ces fameux traits qui dynamisent l’action. Même l’humour est présent : il est une bestiole qui se désole : un escargot reste collé au sol !
En fin d’album, c’est au tour d’une fillette de s’élancer, invitation à l’enfant lecteur à faire la même la même chose. Le livre de l’artiste japonais correspond en effet à l’âge où la lecture se fait corporelle.

Tatsuhide Matsuoka sur le site de L'école des loisirs

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OH ! MON CHAPEAU, par Anouck Boisrobert & Louis Rigaud
France - 2014- Hélium - 16,90 €

On avait été ébloui par Popville, par la Dans la forêt du paresseux, par Oceano, on l’est tout autant et peut-être davantage encore par Oh ! Mon chapeau. Une histoire folle mainte fois racontée, celle d’un chapeau qui s’envole et que son propriétaire cherche à rattraper. La tâche est d’autant plus difficile que, par-delà le coup de vent fatal, un singe malicieux vient de s’en emparer. Et celui-ci de prendre un malin plaisir à entraîner son poursuivant dans un jeu de cache – cache. Le voilà qui disparaît dans une boulangerie, dans un grand magasin, dans un musée, dans une bibliothèque…. Le voilà de plus en plus loin dans la ville et de plus en plus haut. La joie du lecteur est grande lorsqu’il le découvre à l’arrière des décors, en train de manger une viennoiserie, d’essayer des chapeaux ou de se plonger dans un livre. L’histoire aurait pu mal finir, si les auteurs, malicieux à leur tour, ne nous rappelaient que tout ceci n’était qu’une fiction amusante placée d’emblée sous le signe du dessin. Un demi rond et simple trait de crayon constituaient le point de départ de la narration, un demi rond et quelques traits de crayon en constituent l’heureuse conclusion.
Anouk Boisrobert et Louis Rigaud maîtrisent à la perfection l’art du pliage. A la sophistication qui caractérise de nombreux pop up actuels, ces artistes travaillent un dépouillement cubiste d’autant plus expressif que le dessin souvent humoristique et les couleurs habitent les reliefs.


Le site de Louis Rigaud
anouckboisrobert.fr
Le blog des éditions Hélium

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